Validité du testament authentique non signé par le testateur

Le testament authentique non signé par le testateur est valable s'il mentionne une maladie connue de tous comme cause de l'impossibilité de signer, sans donner de précisions relativement à la nature de la maladie. Le testament authentique est soumis à des règles de forme contraignante et la Cour de cassation veille à ce qu'une application trop stricte de ces règles ne fasse pas perdre tout intérêt à cette forme de testament. Les attaques des héritiers pour obtenir la nullité du testament authentique portent sur toutes les conditions de forme et notamment sur la signature de l'acte par le testateur. Le testament authentique doit en principe être signé par le testateur en présence des témoins et du notaire (C. civ., art. 973). Mais il est possible de suppléer à l'absence de signature en respectant les deux conditions édictées par l'art. 973 c. civ. : mention expresse de la déclaration faite par le testateur qu'il ne sait ou ne peut signer et mention de la cause de cette impossibilité de signer. Sur ce second point, la Cour de cassation fait preuve de souplesse et admet que le notaire ne mentionne que succinctement la cause de l'impossibilité de signer. Ont ainsi été déclarées valables les mentions suivantes : impossibilité pour le testateur de signer « en raison de son infirmité » (Civ. 1re, 6 mai 1957, RTD civ. 1957. 565, obs. R. Savatier ; D. 1957. Jur. 559) ou plus récemment « en raison de son état de faiblesse » (Civ. 1re, 28 févr. 2006, n° 03-19.075, D. 2006. 2066, obs. M. N.). C'est à nouveau sur la mention de la cause de l'impossibilité de signer que la Cour de cassation a eu à se prononcer dans le présent arrêt. Par testament authentique, une personne atteinte d'une sclérose en plaques a légué l'intégralité de ses biens à son concubin. Le testament fait mention de l'impossibilité de signer pour la testatrice en raison de sa maladie, sans autre précision. Après le décès, la mère et la soeur de la testatrice attaquent le testament authentique qui, selon elles, ne respecte pas les exigences de l'art. 973 c. civ., car il se borne à indiquer que le testament ne peut être signé par la testatrice « en raison de sa maladie », sans préciser la nature de celle-ci. Leur demande, qui n'avait pas été accueillie en appel, est également rejetée par la Cour de cassation dans les termes suivants : « Attendu qu'ayant relevé que le testament avait été signé par les témoins et le notaire, après mention de l'impossibilité pour la testatrice de le signer en raison de sa maladie, la cour d'appel en a déduit à bon droit que la cause de l'empêchement de signer figurait à l'acte ; que la nature de la maladie, connue de tous, n'avait pas à être précisée ; que le moyen n'est pas fondé.» La Cour de cassation maintient donc sa jurisprudence. Elle veille au respect des conditions de forme du testament authentique, mais écarte toute tentative d'ajout de conditions supplémentaires aux règles légales. On notera cependant que, en précisant que la maladie était « connue de tous », la Haute juridiction semble ajouter une condition à la condition légale : la maladie du testateur doit être réelle et il doit exister un élément de preuve de cette existence, telle que sa connaissance notamment par les héritiers. On peut alors se demander quelle solution elle aurait donnée si ces derniers avait ignoré la maladie de la testatrice. Le testament aurait-il pu être annulé si l'impossibilité de signer n'avait pas été suffisamment établie ? En l'espèce, cette impossibilité était établie, ce qui fait de cet arrêt un arrêt non pas de principe mais d'espèce.

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