Un époux ne peut pas contester le changement de régime matrimonial après qu'il a pris effet, au motif qu'il n'est pas conforme à l'intérêt de la famille

Le changement de régime matrimonial ayant pris effet s'impose à chacun des époux, de sorte que, à défaut d'invoquer un vice du consentement ou une fraude, aucun d'eux ne peut être admis à le contester sur le fondement de l'article 1397 du Code civil.
Cass. 1re civ., 29 mai 2013, n° 12-10027

Cet arrêt permet de revenir sur la condition tirée de la conformité du changement de régime matrimonial à l’intérêt de la famille (C. civ., art. 1397, al. 1er). On se souvient qu’avant l’ouverture de l’action en retranchement à l’ensemble des enfants non communs et la déjudiciarisation partielle par la loi du 23 juin 2006 de la procédure du changement de régime matrimonial, l’intérêt de la famille pouvait faire obstacle au projet des époux.

Encore que la Cour de cassation en avait retenu une conception large en décidant que « l’existence et la légitimité de l’intérêt de la famille doivent faire l’objet d’une appréciation d’ensemble, le seul fait que l’un des membres de la famille risquerait de se trouver lésé n’interdisant pas nécessairement la modification envisagée » (Cass. 1re civ., 6 janv. 1976 : GAJC n° 76). Aujourd’hui, les hypothèses dans lesquelles le changement de régime matrimonial peut échouer comme étant contraire à l’intérêt de la famille, se raréfient ainsi qu’en témoigne cet arrêt.

En l’espèce, deux époux séparés de biens avaient adjoint à leur régime une société d’acquêts, seul le mari apportant à celle-ci des biens présents désignés et les acquêts à venir, l’épouse ne contribuant en aucune manière à l’extension de cette société. Le mari assigna, par la suite, sa femme en nullité du changement de leur régime matrimonial. Il obtint gain de cause en appel, au motif que la modification du régime ne servait que les seuls intérêts de l’épouse, alors qu’elle était excessivement défavorable à ceux du mari.

La Cour de cassation censure cette décision, au visa des articles 1108, 1134 et 1397 du Code civil, en se plaçant sur le terrain du droit des contrats. Le changement de régime matrimonial prenant effet entre les parties à la date de l’acte ou du jugement qui le prévoit est revêtu de la force obligatoire des contrats, pourvu que les conditions de validité en soient réunies. C’est dire qu’il s’impose à chacun des époux sauf pour l’un d’eux à démontrer qu’il a été victime d’un vice du consentement ou d’une fraude. Or, en l’espèce, la cour d’appel avait relevé que le mari avait une parfaite connaissance des biens et droits de la société d’acquêts, ceux-ci étant parfaitement identifiables tant dans leur composition que dans leur nature.

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